Si jamais on vous demande ce qu'est le plaisir à l'état
pur, n'hésitez plus et répondez : Tomorrowland
! On n'y retrouve ces fantasmes enfouis et science-fictionnels
des années 50, ceux que l'on trouvait dans les vieux
comics et au gré de quelques planches tombées
depuis dans l'oubli. On plonge à 200 km/h dans cet univers
bigarré, émerveillé et irraisonnablement
magique, nourrit de sentiments qui sont -mais ce ne sera que
la conclusion- en voix de disparition alors qu'ils sont l'essence
même de l'espèce humaine, ceux qui ont façonnés
son évolution étonnante : l'espoir et le rêve.
Et c'est ici que cette oeuvre de SF prend toute son ampleur
ainsi qu'une dimension de film "non-familial" si l'on
s'en tient aux critères hollywoodiens ; la raison principale
de son échec à mon sens.... Trop réflexif
et pompeux, l'aventure a dû paraître incompréhensible
à bon nombre de jeunes spectateurs que les parents ont
poussé dans les salles obscures. Il nous rappelle que,
à l'instar de la nourriture et de la boisson, le rêve
est vital à l'homme : si l'on pouvait l'empêcher
de s'évader de la sorte il en mourrait. Et c'est peut-être
le message sous-jacent de Tomorrowland, très ancré
dans l'histoire contemporaine : l'absence de rêve est
l'un des ingrédients du défaitisme humain,de la
facilité et de la paresse intellectuelle, ceux-là
même que nombre de grospucules politiques ou sociaux mettent
à leur profit, asseyant leur pouvoir et l'articulant
autour, en instaurant une "politique de la peur",
à l'image de ce qui se déroule dans le film. Je
sais : je vais peut-être un peu loin dans l'analyse, mais
les éléments sont là, sous nos yeux !
Et puis c'est une oeuvre atypique : un brin anar (on évoque
une absence louable de bureaucratie ou de politique, on y détruit
des biens publics jugés nocifs...), le scénario
est en lui-même un rien bordélique, peu conventionnel
en ce sens que l'on a du mal à savoir ce qui va ressortir
des scènes auxquelles on assiste. Bordélique,
fou, surprenant, même assez violent. On est décidément
loin des adaptations lissées et policées des "Young
adult novels" avec leurs éternelles histoires d'élu
(e) et de guide qui regardent toutes dans la même direction,
sans aucune ambition littéraire ou fondamentale. Et puis
c'est une oeuvre bourrée d'idées brillantes, très
visuelles, mais qui vous mettent à chaque fois un coup
d'aiguilles dans les fesses ! Et de personnages dont on se sent
tout de suite proche, personnages dont les relations sont intéressantes
(les liens robot / humain). Drôle, ambitieux, grandiose
et spectaculaire, original jusqu'à la moële et pourtant
pas complètement réussi non plus. Trop dense pour
ne durer que 2 heures alors qu'il manque de développer
des pans de scénario, il en découle une impression
de flou désagréable... de frustration peut-être.
Poursuite ? Oui : car le futur ne tombera pas dans nos mains,
tout cuit, il faut le créer, le façonner, quitte
à être un peu idéaliste pour nous faire
avancer au-delà de nos espoirs ; un peu d'espoir dans
un monde de brutes trop terre-à-terre. Tomorrowland est
finalement un peu comme un retour à ces films de SF de
mon enfance, façon Planète
interdite... Beaucoup même.
NOTE : 15-16 / 20